2023

Pascal Contet, l’accordéon hors frontières
14 février 2023 – La Terrasse
À soixante ans, Pascal Contet, figure majeure de l’accordéon contemporain depuis plus de trente ans, n’en est pas à l’heure des bilans. Création de Weber à vif à La Scala en mars, reprise de Fiesta Latina et, cet été, sixième édition de son festival Fort en musique, cette année 2023 illustre plus que jamais une soif d’expériences artistiques « hors frontières ». Entretien avec un musicien caméléon qui se nourrit de rencontres.
Comment est né le trio Weber à vif ?
Pascal Contet : Il a été créé à partir d’une proposition de Jacques Weber : improviser, avec Greg Zlap à l’harmonica, sur un florilège littéraire allant de Hugo à Maïakovski et Artaud. Je n’ai jamais eu de plan de carrière : mes projets sont le fruit de rencontres, avec la danse, l’art numérique, et ici le théâtre. J’avais déjà l’expérience du duo aux côtés de partenaires au long cours comme Marie-Christine Barrault, Andréa Ferréol, ou François Marthouret et Dieudonné Niangouna. Cette forme en trio est nouvelle pour moi, qui plus est avec un musicien qui vient d’un autre univers, le blues et le rock. Au-delà de ces différences, nous avons trouvé une connivence, renforcée par la proximité du son de nos deux instruments.
Un dialogue entre des créativités qui se nourrissent l’une de l’autre.
Qu’est-ce qui vous porte vers ces formes hybrides ?
P.C. : Ce qui m’intéresse dans ces lectures, c’est de capter en musique, comme un photographe, le rythme de l’instant, dans un esprit de spectacle vivant où chaque représentation est unique. L’improvisation y est une composition éphémère qui se développe dans un dialogue entre des créativités qui se nourrissent l’une de l’autre, où chacun est à la fois musicien et comédien. La musique s’épanouit autour du texte à la manière d’un lierre qui entoure le tronc d’un arbre sans jamais l’étouffer. C’est aussi un moyen d’aller au-delà du public habituel de connaisseurs.
Comment développez-vous les échanges entre les répertoires et les pratiques ?
P.C. : Le premier exemple qui me vient est mon duo avec la contrebassiste Joëlle Léandre qui m’a libéré dans ma pratique de l’improvisation, et avec laquelle je prépare un cinquième album pour 2024. Et plus proche de nous, avec Fiesta Latina, que je reprends à Paris aux Invalides en mai avec le Quatuor Strada et le contrebassiste Yann Dubost, j’explore le cousinage avec le bandonéon et Piazzolla, dans l’esprit de la transcription, du côté des origines du tango et des milongas. Ce work in progress évolue au gré des effectifs : je le reprendrai cet automne avec l’Orchestre de Picardie, puis avec celui de l’Opéra de Limoges.
Quel rapport entretenez-vous avec la transcription ?
P.C. : Quand j’ai commencé, on n’en comprenait pas l’intérêt pour l’accordéon. Aujourd’hui, grâce à la reconnaissance des ressources de l’instrument, ce tabou a sauté parmi la jeune génération. Le déclencheur pour moi a été le travail avec Bernard Cavanna autour des lieder de Schubert.
L’accordéon a une couleur qui donne un goût spécifique dans l’orchestration.
Comment ce côté caméléon de l’accordéon se traduit-il dans les œuvres que vous créez ?
P.C. : Le double concerto Double Act de Donghoon Shin, que je vais jouer en Corée en avril et la saison prochaine avec l’Orchestre national de Bretagne, offre un magnifique exemple de cette identité double, dans une sonorité quasi fusionnelle et singulière avec le sheng, orgue à bouche chinois, et avec l’orchestre. L’accordéon a une couleur qui donne un goût spécifique dans l’orchestration, même si on ne l’isole pas, un peu comme dans une alchimie culinaire.
Peut-on voir votre festival Fort en musique comme un résumé de votre démarche artistique ?
P.C. : Après cinq premières éditions qui ont mis l’accent sur les liens entre texte et musique, nous offrons cette année un coup de projecteur sur les instruments rares et non conventionnels, avec un voyage parmi les traditions non-occidentales. Les concerts seront présentés par l’humoriste Alex Vizorek et seront enrichis par des échanges avec les artistes. Le but est d’encourager la curiosité du public, dans un partage inventif à rebours des grosses machines et des tournées clefs en main.
Propos recueillis par Gilles Charlassier
2022
Passages radios pour le festival Fort en Musique
3 juillet 8h40 : France Inter Le choix des festivals par Anna Sigalevitch
2 août 8h10 : France Bleu Belfort-Montbéliard
9 août 16h40 : France Bleu Alsace Thierry Calot invite Pascal Contet
10 août 8h10 : France Bleu Belfort-Montbéliard
11 août 8h10 : France Musique L’Agenda de l’été par Christophe Dilys
date non déterminés : Carte postale de Séverine Ferrer Suivez le guide par France Musique
12 août 8h10 : France Musique Le Tour de France des festivals par Gabrielle Oliveira-Guyon
12 août 9h10 : France Bleu Alsace Maxime invite Pascal Contet
12 août 18h10 : France Bleu Belfort-Montbéliard
13 août 8h10 : France Bleu Belfort-Montbéliard

Les Traversées musicales de Noirlac – Classique mais pas Has Been, 18 juillet 2022



Retour sur…
Le festival 1001 Notes qui a réussi à se réinventer à la patinoire de Limoges
Cette fin juillet
Audace et inventivité caractérisent les artistes qui se sont produits lors la dernière édition du Festival 1001 Notes, qui s’est achevé ce samedi. Pour le plus grand bonheur du public, qui a été au rendez-vous des concerts maintenus.
Inutile de chercher à classer 1001 Notes. Ce festival est hors normes. Voilà ce qui fait son charme et sa force. Ancré dans une inspiration classique, il échappe vite à ce cadre, le déborde de manière foisonnante, en un florilège de mille et une notes propulsées dans notre modernité.
Magique, accessible
La spécificité de ce festival : réunir des musiciens qui, au-delà du brio, sont d’authentiques créateurs et créatrices. Et leurs créations musicales font entrer le public dans un monde magique et, de ce fait, accessible.
Une clôture autour de Juliette et Jean-Pierre Armanet
La soirée de clôture, ovationnée par le public, a été particulièrement magique… L’heureuse idée ici était celle du très inventif Albin de La Tour, directeur de 1001 Notes, qui signe un festival brillant et novateur dans sa conception moderniste du ”classique”. Cette idée était de réunir père et fille Armanet en compagnie d’une incroyable brochette de talents, venus interpréter les œuvres du compositeur.
La scénographie était belle. Les musiciens et musiciennes étaient conviés autour d’une table pour un festin de notes généreusement partagées. De Pascal Contet qui tire des sons stupéfiants et envoûtants de son accordéon, en passant par le duo Brady au violoncelle ou encore la pianiste Dana Ciocarlie tous ont joué les partitions de Jean-Pierre Armanet. Des incursions dans le répertoire (Rossini, Saint-Saëns) ajoutaient encore au brio de ce concert.
Quant à Juliette Armanet, elle n’a volé la vedette à personne, proposant avec délicatesse quelques-uns de ses tubes, avant un final en duo touchant avec son père.